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  N° 0        

27 février 2009

 
  Sommaire:            
    Le port de Galisbay-Bienvenue, une porte ouverte sur le monde.    
    Le port de Galisbay en chiffres.    
    Le SXM Economique, comment cela marche?    
    Daniel Gibbs, 1er vice-Président de la Collectivité de Saint Martin    
    Les brèves: la taxe routière, la taxe de mouillage, les abris bus, le prix de l'eau.    
                 
    Editorial            
   

La crise! Ouvrez une radio, votre télévision, parlez à vos amis, partout le leitmotiv inlassablement martelé résonne: la crise! Si elle a parfois bon dos, il n’en est pas moins vrai qu’elle est une réalité, pour nous à Saint Martin, comme ailleurs sur la planète. Ceci étant, est-ce la fin d’un monde? Un ami me disait (vœux pieux?) que nous serions moins touchés ici qu’ailleurs, parce que la crise, nous la vivions déjà depuis plusieurs années. Situés dans la zone dollar, très dépendants de l’économie des USA par le flux de touristes qui nous en arrivent, nous avons, avant d’autres, su adapter notre démarche à ces temps de dollar faible ou de récession, mot qui rend plus d’un gouvernement circonspect. Serons-nous au final relativement épargnés? Nos autorités en font le pari, et moi aussi, dans une certaine mesure, qui vous propose aujourd’hui un nouveau magazine internet gratuit ne parlant exclusivement que de l’économie, et à destination des acteurs de la vie économique. Parce que nous avons des atouts, et que bien souvent, par manque de communication, nous ne le savons pas. Ce magazine se voudra donc le lien entre les opportunités et les décideurs. Vous retrouverez au fil des semaines des articles de fond présentant des entreprises locales, des patrons, des figures marquantes de notre société, l’actualité de la Collectivité quand elle intéresse directement le monde économique, la présentation de projets d’avenir, des baromètres de l’évolution de divers paramètres et bien d’autres sujets encore, sans oublier nos voisins hollandais, composante essentielle, mais pas exclusive, de notre équilibre. Ces colonnes seront ouvertes à tous, seulement filtrées en fonction de leur apport informatif, quel que soit le bord politique. Magazine apolitique d’information, nous espérons qu’il deviendra rapidement le média des décideurs et acteurs de l’économie de Saint Martin. Nous resterons, à la rédaction, dans notre rôle informatif, critique, mais sans parti pris.

   
         

Yves KINARD

   
               
   

Le port de Galisbay-Bienvenue, une porte ouverte sur le monde.

   
                 
   

   
                 
   

Si pour des considérations purement physiques liées à la profondeur de la baie, le port de Galisbay ne peut rivaliser avec son homologue de la partie hollandaise, il dispose néanmoins de gros atouts appelés à se développer dans le futur. Le tout premier est qu’il est situé en partie française, donc dans l’Europe, et peut donc de ce fait émarger aux aides Feder, lesquelles sont susceptibles de contribuer largement à son développement (au contraire de la partie hollandaise qui ne peut obtenir des aides que du FED, soit environ 10% des montants du Feder). Ce qui est d’ailleurs déjà le cas puisque l’actuel nouveau bâtiment administratif, cœur stratégique du développement de l’infrastructure de Galisbay, a été co-financé à hauteur de 1.350.000 € par le port lui-même (48%), l’Etat (DGE, 27%), et le Feder pour le solde (25%). Ce qui est loin d’être négligeable. Il faut aussi tenir compte que les aides Feder font appel à des mécanismes de remboursement, ce qui suppose au préalable la capacité de pré-financement.

   
                 
    La problématique portuaire.    
   

Dans ce cadre, la direction du port, comme la Collectivité sont bien conscientes de ce besoin d’une porte ouverte sur le monde, que ce soit comme point d’entrée, comme, marginalement pour le moment, portail d’exportation. D’où la nécessité d’adapter l’outil aux exigences internationales et de la rentabilité. Actuellement, par manque de tirant d’eau, nous n’accueillons que des bateaux de faibles déplacements, lesquels ne sont positionnés que sur du trafic régional, quand nos voisins hollandais, accueillent des navires océaniques en provenance de l’Europe. Aujourd’hui, à quelques exceptions près, le port de Pointe Blanche est l’entrée obligée de la plupart des denrées ou matériaux arrivant à Saint Martin. Ce qui n’est guère concevable à long terme, même si nos bonnes relations avec nos voisins ont stabilisé une solution de dépendance.

   
                 
    Augmentation des capacités.    
   

Pour donner cette autonomie obligatoire, même sur une île bi-nationale où les évolutions sociales peuvent être différentes d’un côté et de l’autre, la partie française se doit d’investir dans une modernisation de son outil. La première étape, en son temps, à visé à l’augmentation des surfaces disponibles, la mise aux normes ISPS (voir encadré)  des infrastructures et la construction d’un bâtiment administratif abritant non seulement les autorités du port, mais aussi les sociétés opérant dans son enceinte. La deuxième phase va viser à augmenter le tirant d’eau par dragage d’un chenal d’accès porté à 9m, tandis que le sable sera utilisé pour créer des terre-pleins gagnés sur la mer. Ce ne sera certes pas encore suffisant pour accueillir la totalité des gros porteurs océaniques, mais augmentera sensiblement l’offre, donc le flux commercial susceptible d’être capté par la plate-forme de Galisbay. Peu à peu, le port deviendra un vrai poumon économique pour Saint Martin.

   
     

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Le port de Galisbay en chiffres.

   
                 
   

Le port de Galibay est apparu relativement récemment. En effet, depuis toujours, c’était l’anse devant Marigot (l’actuel parking devant le restaurant « La Vie en Rose ») qui accueillait les bateaux, pêcheurs et goélettes inter-îles. Par la suite, c’est le quai devant le phare qui sur 100m pouvait accueillir de part et d’autre deux navires tandis qu’une rampe d’une vingtaine de mètres permettait le trafic RoRo (Roll on, Roll off, trafic roulant). Mais devant l’augmentation du trafic et le manque d’espaces disponibles (seulement 5 à 7000 m² de terre-pleins), la Commune, après des études, a décidé d’implanter un nouveau port à la Pointe Aragot sur le site de Bienvenue, dans la baie de Galisbay. C’est en 1992 que les travaux débutèrent, menés par la société Bouygues Offshore. Ils durèrent jusqu’en 1995 et c’est seulement deux jours après le mémorable passage du cyclone Luis que le port ouvre, accueillant notamment le Francis Garnier, navire militaire bien connu dans nos eaux, qui venait apporter les produits de première nécessité.

   
                 
   

   
                 
   

Le port aujourd’hui.

   
   

Avec une digue de protection de 170m de long sur enrochement et tétrapodes, 280 m linéaires de quais, 30 m de quais affectés aux RoRo, un hangar de 1000 m², 36 prises pour les conteneurs réfrigérés et 30.000 m² de terre-pleins, une surveillance 24h/24h et une classification ISPS, le port voit transiter 300 à 350.000 tonnes de marchandises diverses, principalement à l’importation, mais le trafic de re-distribution vers les îles voisines n’est pas négligeable avec 1 à 2  équivalent conteneurs 40 pieds/jour. Jusque dans les années 2000, la plate forme polyvalente de Galisbay rivalisait avec Pointe Blanche en partie hollandaise. Mais les gros investissements réalisés par nos voisins joints à l’avantage décisif du tirant d’eau, leur ont permis de reprendre l’avantage. Les investissements en partie française ont été initialement de 64 M FF (+10 M €), pour la première phase, tandis que la deuxième ne se montait qu’à 5 M €. Actuellement sous statut d’établissement public, avec un chiffre d’affaires tournant aux alentours de 2M€, une gestion saine en équilibre, voire excédentaire, le port emploie 24 personnes réparties entre le port et la gare maritime. Directement liées à l’activité portuaire et ayant maintenant leurs bureaux dans le nouveau bâtiment, pas moins de six sociétés fournissent du travail à 35 personnes. Par ailleurs la politique du port est de faire appel à des prestataires extérieurs pour la manutention. Dans le temps, une grosse grue de 160 tonnes opérait sur le port, mais elle a été vendue et aujourd’hui restent seuls les reach tackers (clarks pour conteneurs) pour la manœuvre des « boîtes », lesquels sont opérés dans le cadre d’un contrat avec des prestataires privés qui assument ainsi la maintenance, la formation et les charges du personnel de manutention.

Le port gère aussi entre 70 à 80 escales par an de gros navires à passagers qui le plus souvent mouillent en rade (où ils payent un droit) et plus rarement se mettent à quai, comme le Sea Dream, navire de 101 m de long et 110 passagers. Ces bateaux de la mini-croisière sont d’un apport important pour Saint Martin, car c’est une clientèle plus aisée que les paquebots escalant à Philipsburg.

Chaque jour, avec des bateaux qui nous arrivent de toute la Caraïbe et plus particulièrement de la Guadeloupe, St Barth, les USA, mais via un transbordement à St Thomas, ou encore de Porto Rico, le port est vraiment une porte ouverte sur le monde extérieur et un poumon économique indispensable (dont il faut signaler une remarquable régularité sans mouvements sociaux comme en Guadeloupe).

   
                 

Albéric Ellis, 38 ans, est depuis quelques années à la direction du port. Précédemment Directeur Commercial dans le cadre de l’ancienne Régie, il est maintenant le Directeur en titre de l’Etablissement Public depuis le 1er janvier 2008. Saint Martinois de souche, il est détenteur d’une maîtrise en commerce extérieur acquise à l’Ecole Supérieure de Commerce de la CCI en Guadeloupe, puis d’une formation supérieure à la gestion portuaire obtenue à l’institut IPER du Havre.

 
                 
   

L’avenir.

   
   

Dans le cadre de son développement, le port compte maintenant sur la troisième phase pour augmenter ses capacités. Avec un investissement prévu à hauteur de 25 M€, actuellement en cours de négociation pour son financement, Galisbay-Bienvenue se verra doté à terme de 200 m de quais et de 25.000 m² de terre-pleins supplémentaires, mais surtout d’un chenal dragué sur 1000 m de long et 100m de large à 9m, ce qui autorisera des navires de beaucoup plus fort tonnage à fréquenter la plate-forme. Un hangar frigorifique de 3000 m² est aussi envisagé qui permettra d’offrir aux petites entreprises n’ayant pas les moyens suffisants pour entretenir des installations de froid importantes de disposer d’un outil apte à mieux respecter la chaîne du froid.

Par ailleurs, à moyen terme, la politique de la Collectivité est d’acheter les terrains autour de l’enceinte portuaire de manière à créer une zone industrielle et artisanale directement liée ou ayant un intérêt à la proximité de cet outil de première importance. Dans le même cadre, une initiative visant à établir un pôle pour les nouvelles technologies de l’information et de l’informatique devrait trouver sa place, qui, d’une part servira à la base portuaire, mais d’autre part pourra voir ses compétences exportées vers d’autres installations dans la Caraïbe.

Il faut néanmoins terminer sur un bémol, qui n’est pas dû d’ailleurs au port, c’est le financement de cette troisième phase. En effet, si dans le passé le Feder a contribué à la modernisation de l’outil, il semble bien que dans la tranche actuelle des aides européennes, rien n’ait été prévu pour le port. Or, dans le contexte de 2009, trouver des financements privés et en assumer une part ne va pas être chose aisée pour la Collectivité et l’Etablissement portuaire. Espérons que cela ne retardera pas la mise en œuvre, parce que durant ce temps nos voisins se développent et captent ou détournent des marchés qu’il sera dur de reprendre. YK

   
       

 

       
   

Le code ISPS.

   
   

Au lendemain des attentats du 11 septembre, les américains ont été pris d’une frénésie sécuritaire qui les a conduit à imaginer le pire, et notamment des menaces sur d’autres lieux stratégiques aux rangs desquels les ports, principales entrées économiques dans un pays, constituent des cibles de choix. D’où l’élaboration d’une norme extrêmement sévère permettant de contrôler les accès des enceintes portuaires. Cette norme, imposée au départ aux ports américains, s’est rapidement vue élargie au monde entier dans la mesure où la nation la plus puissante du monde a imposé aux navires fréquentant ses eaux de ne pouvoir y entrer qu’en démontrant une traçabilité par des ports soumis aux mêmes contraintes sécuritaires. Devant le risque de voir les navires se détourner de leurs installations, la plupart des ports ont été contraints d’adopter ces standards, entraînant des frais très importants à charge des collectivités. A Saint Martin, Galisbay est classé ISPS (après inspection) depuis 2006. Deux référents locaux ont validé les installations, après avoir eux-mêmes suivi des formations qualifiantes.  Ce sont MM Ellis, Directeur du Port de Galisbay, et  Taquin, Directeur de la Marina Fort Louis, elle-même classée aussi ISPS.

   
                 
     

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Le SXM Eco, comment cela marche?

   
                 
   

Le SXM Eco est diffusé par internet sur base de notre fichier regroupant un maximum de sociétés et de chefs d’entreprises ou d’artisans, mais aussi de professions libérales et de particuliers de Saint Martin, partie française. N’hésitez d’ailleurs pas à diffuser notre magazine ou rejoindre notre liste de diffusion. Comme tous magazines, nous n’échappons pas au besoin de financement, même si nos choix de publication allègent nos frais. Nos colonnes laisseront donc place à vos annonces, à du publi-rédactionnel, à votre promotion. Néanmoins, nous essayerons dans la mesure du possible de respecter un équilibre: 60% de textes et d’informations, articles et photos, et 40% de publicités ou petites annonces.

Le choix de base d’une publication internet a été fait sur une constatation assez partagée à SXM: peu de gens ont le temps de lire les quelques journaux papier, même de format réduit. Sans parler des nombreuses, et parfois luxueuses publications, plus souvent destinées au grand public et aux touristes. D’où l’idée de découvrir l’info en ouvrant ses emails, le vendredi matin, dernier jour de la semaine, laissant ainsi la possibilité de lire durant le week-end à tête reposée, éventuellement en l’imprimant.

Une autre donnée qui découle directement de l’analyse, est qu’un épisode de ralentissement économique est logiquement le meilleur moment de faire sa promotion, même si c’est aussi celui où les moyens font le plus défaut. Mais l’histoire montre que ceux qui s’en sont sortis sont ceux qui ont su profiter d’une période de crise pour mieux apparaître, et parier sur l’avenir. Donc, communiquez, parlez, faites-vous connaître!

   
     

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Parcours

   
   

Daniel GIBBS, 1er Vice-Président.

 
   

L’économie à Saint Martin a un nom: Daniel Gibbs. C’est lui en effet qui s’est vu attribuer ce portefeuille qui porte pour une bonne part nos espérances dans l’avenir. En charge du Développement Economique, du Tourisme et des Transports, il cumule ainsi ce qui fait rentrer le nerf de la guerre sur la partie française.

 
   

Et ce n’est pas au hasard que cette tâche lui a été dévolue. Issu  de l’une des plus anciennes et importantes familles de Saint Martin, fils du Dr Victor Gibbs, l’un des trois premiers médecins de l’île, mais aussi l’un des fondateurs de la Semsamar, il a pris tout naturellement le chemin de la pratique notariale, base obligatoire de la structuration d’une société. Avec une maîtrise en Droit Privé, un D.E.S.S. en Droit Notarial à l’université de Nice, couronnée par un Diplôme Supérieur de Notariat (DSN) à Paris en 2000, sa formation est très complète. Des stages à l’étude de la SCP Mouial , Notaires associés et d’autres au service juridique de la Semsamar, ont étoffé son expérience avant qu’il rejoigne d’ailleurs comme Notaire Assistant l’étude Mouial jusqu’à ce jour.

Entrée en politique.

C’est sous le patronage et à la demande de Albert Fleming qui voit en lui un jeune prometteur pour l’avenir de l’île que Daniel Gibbs fait son entrée en politique en prenant part à la campagne des municipales. Avec la victoire de son camp, il devient Maire Adjoint de 2001 à 2007 et accompagnera le Maire durant la difficile phase du changement statutaire, y gagnant ses galons d’homme politique. Vice-Président de l’Office de Tourisme sous la Présidence de Roméo Fleming, il comprend que le tourisme est le moteur essentiel de notre économie et n’aura de cesse depuis de faire tous les efforts pour le dynamiser. On peut y ajouter qu’il était dans le même temps Président des commissions de l’Urbanisme, du POS, du Port, des Affaires Maritimes locales, Vice-Président à l’Environnement, aux Autorisations de Voirie et de l’Aéroport de Grand-Case. Avant de prendre ce portefeuille dans la nouvelle Collectivité à l’aboutissement de laquelle il a largement contribué, il était donc très loin d’être néophyte dans les matières qui ont été confiées à sa responsabilité. Nous l’avons rencontré pour lui poser quelques questions:

SxmEco: Daniel Gibbs, pourquoi entre-t-on en politique à Saint Martin?

D. Gibbs: Je ne sais pour les autres, mais pour moi c’était très clair. Ayant eu la chance de faire mes études en France, de voyager, j’avais un œil extérieur qui me permettait de mieux apprécier le chemin à faire encore à Saint Martin. Quand je suis revenu en 1996, c’est cela qui me motivait pour faire quelque chose pour mon île. Par ailleurs, je trouvais que les jeunes ne s’impliquaient pas assez dans la vie politique.

SxmEco: En quoi croyez-vous pouvoir apporter quelque chose à Saint Martin?

D. Gibbs: Justement, c’est cet œil extérieur. Non pas que ce qui avait été fait avant était mauvais, mais il pouvait être complété, éclairé différemment. En plus, les études que j’avais faites me permettaient d’apporter concrètement quelque chose à Saint Martin. Aussi quand Albert Fleming m’a posé la question de mon engagement, j’ai souhaité savoir jusqu’où et dans quel domaine allait cet engagement. Et sa réponse à été claire et était dans le sens de l’utilisation de mes compétences. D’abord acquises dans le cadre professionnel via mes diplômes, mais aussi via les divers stages que j’ai faits notamment à la Semsamar où à l’Etude Mouial avant d’y être engagé. C’est pourquoi, quand nous avons gagné les élections, j’ai hérité des portefeuilles qui allaient dans le sens  de mes compétences, mais aussi vers le tourisme. Parce que j’ai très tôt compris que notre seule industrie ici c’est le tourisme, mais que nous ne l’avions jamais réellement traité. Dans les belles années, nous étions une destination qui sans effort voyait venir les touristes. Aujourd’hui, le paysage a changé et j’ai compris, avec d’autres, qu’il fallait maintenant travailler pour faire venir le touriste, car nous étions en concurrence sur sensiblement les mêmes thèmes que bon nombre d’îles dans la Caraïbe et dans le monde.

 SxmEco: Vous avez 39 ans, marié, un enfant, un deuxième en route, un engagement tel que celui-là ne suppose-t-il pas des sacrifices importants aussi bien pour la vie de famille que pour votre avenir professionnel? Comment conciliez-vous tout cela? Et question subsidiaire, l’un des deux, sinon les deux volets ne vont-ils pas souffrir de ces emplois du temps très chargés?

D. Gibbs: Quand Albert Fleming m’a proposé de  le rejoindre, j’ai beaucoup parlé avec ma famille, mon épouse, mes parents, mais aussi mon employeur, de ce que cet engagement allait impliquer. L’exemple me venait de mon père qui s’est toujours largement impliqué bénévolement dans et pour l’île et c’est sûr que nous avons sans doute un peu souffert. Mais une fois compris que ce qu’on ne peut donner à sa famille, on le donne au sens large à la famille de Saint Martin, et cela nous revient de toute manière, les choses sont plus claires. Je l’ai compris maintenant, et cela m’a aidé à structurer mon engagement. Mais c’est vrai que c’est lourd et que cela suppose des sacrifices, notamment au niveau professionnel. Si je ne suis pas encore Notaire Associé, c’est entre autre parce que je n’ai pas de temps disponible. Donc quelque part mon avenir professionnel souffre de mes engagements. J’essaie par contre de préserver ma famille au maximum. Et donc, il faut faire des choix, comme ceux annoncés lors de la campagne et que je commence à mettre en application. Je peux annoncer ainsi que cette année, peu à peu, je vais me retirer de l’Etude qui me prend quand même encore une part non négligeable de mon temps. Mais comme il faut bien vivre, je compte développer d’autres activités moins prégnantes, où je pourrai m’organiser différemment.

SxmEco: Quelle est votre vision de la crise appliquée à Saint Martin, et éventuellement, puisque nous y sommes fort liés, à Sint Maarten?

D. Gibbs: Je ne suis pas de ceux qui s’appesantissent sur cet aspect. Elle existe, on ne peut le nier, mais en même temps j’y vois comme une chance. D’une certaine manière aussi, si nous savons bien nous défendre, nous devrions arriver à tirer notre épingle du jeu. Parce que même en ces temps de crise, il y a des gens moins touchés, d’autres qui ont encore de l’argent et qui voyagent. Le tourisme n’est pas mort avec la crise, mais à nous de faire savoir que la destination est là, qu’elle a des atouts, de nous battre. Et particulièrement, puisque l’on parle de Sint Maarten traduire ce qui jusqu’à maintenant a été (en partie) des belles paroles, en réalité concrète, c’est-à-dire la coopération trans-frontalière. Et même plus loin, il faut travailler globalement avec les autres îles voisines, Saint Barth, Anguille et même Saba, parce que nous ne représentons qu’une seule destination, avec certes ses spécificités. Quand on parle de la Friendly Island, ce n’est pas seulement au niveau humain, mais c’est aussi environnemental. C’est cela que nous devons mettre en avant comme aussi maîtriser notre développement. Aujourd’hui avec l’aéroport de Juliana, nous avons un véritable « hub » international d’où partent et y arrivent des avions qui nous relient au monde entier. Nous alimentons par ailleurs au départ de ce « hub » le trafic régional. C’est en cela que nous sommes au cœur de ce triangle touristique. A nous de le défendre, de le valoriser, de le faire connaître.

SxmEco: Que pensez-vous pouvoir faire et organiser pour relancer l’économie de Saint Martin à l’heure où la crise est venue rajouter une couche à l’impression générale que la Collectivité a un peu de mal à se mettre en place? A quelle échéance?

D. Gibbs: En relation avec le Président Gumbs, et mon collègue Vice-Président, Pierre Aliotti en charge du Développement Durable, nous travaillons à une relance contrôlée des grands travaux publics. Mais cela doit se faire dans le cadre d’une parfaite maîtrise des budgets Par ailleurs nous voulons aussi contribuer, aider, à relancer des grands projets dans le secteur privé qui depuis trop longtemps patinent. Par exemple La Belle Créole, la Baie Nettlé, ou encore Happy Bay. Nous voulons aussi aider l’hôtellerie au niveau des permis ainsi que les projets de grosses villas.

Si l’impression générale est que la mise en place de la Collectivité tarde, c’est parce que nous prenons le temps de faire en sorte de ne pas nous tromper. Nous prenons beaucoup de précautions à coup d’études préparatoires pour étayer nos décisions, mais en même temps nous avons voulu continuer à faire fonctionner la Collectivité normalement et notamment dégager des résultats en même temps que travailler sur les transferts de capitaux.

C’est ainsi que nous travaillons aussi sur un projet de défiscalisation applicable seulement aux habitants de Saint Martin. Aujourd’hui, un contribuable métropolitain peut défiscaliser ses revenus à Saint Martin, mais pas un de ses habitants. Nous y travaillons, mais cela prend du temps. Avec la mise en place de la Collectivité, nous avons acquis des compétences, mais aussi et surtout le droit d’être consultés par Bercy et le Gouvernement pour toute décision qui concerne Saint Martin. Ainsi, on ne peut voir apparaître un projet dans le cadre de la défiscalisation qui ne nous ait été connu au préalable et sur lequel nous aurons été amenés à nous prononcer. Nous pourrons ainsi choisir notre  développement et ne pas le subir.

SxmEco: Les grands projets dont on parle épisodiquement comme, le schéma routier, la marina, l’agrandissement de l’aéroport de Grand Case, ou encore la troisième tranche du Port de Galisbay ne vont-ils pas souffrir de la crise notamment au niveau de leur financement?

D. Gibbs: Les retards, ou les lenteurs peuvent passer pour des problèmes de financement, mais ce n’est pas le cas. La crise n’affectera pas ces grands projets simplement parce qu’ils sont publics et donc financés au travers d’un montage initié par la Collectivité. Mais auquel prend part l’Etat, et le Feder à nos côtés. Et le pré-financement sera acquis par des négociations avec des banques relais. Mais dans la mesure où nous finançons des actifs, nous ne creusons pas le trou des finances de la Collectivité. Les intérêts certes pèsent sur nos finances, et c’est pour cela que nous étudions soigneusement nos dossiers et que nous voulons maîtriser en tous points notre budget.

Les lenteurs sont aussi dues au fait que nous ne voulons pas, par exemple, lancer les travaux d’ouverture d’une nouvelle route avant d’avoir pensé tout ce qui va avec. Notamment l’assainissement, l’équipement, etc… Tout cela prend du temps. Bien sûr l’on nous objectera que prochainement nous allons ouvrir les contournements qui permettront de désengorger la route de Grand Case et celle Bellevue. Quelqu’un va-t-il s’en plaindre?

Même chose dans le projet de l’aménagement du Front de Mer où nous avons pris le temps de lancer des consultations, lesquelles nous ont coûté de l’argent. Mais à terme, nous disposons maintenant de trois études qui nous montrent clairement ce que l’on pouvait faire, les risques à le faire, et les choix à poser. Nous avons maintenant retenu l’un des cabinets, mais comme nous sommes propriétaires des études, elles seront profitables au projet définitif dont j’ai bon espoir que la première tranche, celle visant à la protection du site, les digues donc, soit réalisées dès 2012, pour que nous puissions accueillir à la fois nos premiers paquebots, mais aussi les méga-yachts.

SxmEco: On le sait, l’attractivité des départements d’Outre-Mer précédemment et artificiellement organisée  par l’Etat, je pense notamment à la défiscalisation, ont certes conduit au développement, mais aussi à des dérives aujourd’hui condamnées et qui tâchent bien involontairement la réputation de ces zones ultra-marines. Que pensez-vous pouvoir faire pour attirer les capitaux nécessaires, sans pour autant entraîner dans le sillage le cortège habituel de spécialistes du détournement législatif? Je pense évidemment à nos entreprises qui ont besoin de financement si elle veulent se développer dans un environnement de plus en plus compétitif.

D. Gibbs: Encore une fois, tout ne se fait pas en seul jour. Pour faire venir des investisseurs, il faut rendre notre fiscalité attrayante. Nous y travaillons, car il faut éviter les pièges du passé. Nous avons déjà fait quelques avancées, d’autres sont programmées. (ndlr: un prochain article traitera de la fiscalité)

SxmEco: On a un peu l’impression parfois à Saint Martin que nous manquons d’ambition. Après tout, tous les grands projets sur l’île se sont faits du côté hollandais alors qu’au lendemain de Luis nous nous sommes relevés plus vite que nos voisins. Les carcans de l’Etat, de la Guadeloupe ou de l’Europe sont-ils suffisants pour expliquer ce retard pris en quelques années?

D. Gibbs: Après Luis, c’est vrai, nous avons reconstruit assez vite et pendant à peu près trois ans nous étions à niveau avec la partie hollandaise. Mais eux ont alors accéléré leur développement, mais sans réellement le maîtriser. Aujourd’hui, on voit poindre les problèmes de ce développement anarchique. Les écarts se creusent, la violence augmente, mais surtout les infrastructures ne suivent pas, notamment de notre côté, puisque, je le disais tout à l’heure, nous sommes une destination unique. Donc les touristes qui viennent chez eux, viennent chez nous. Il faut les accueillir, il faut des routes, de l’attractivité et comme nous prenons le temps de réfléchir pour ne pas nous tromper dans le sens de notre développement, nous accusons un retard apparent sur nos voisins.

Nous prenons le temps par exemple de mener conjointement deux études, qui, je l’espère, aboutiront enfin avant la fin de l’année. Je dis enfin, parce que l’on en parle depuis longtemps. Mais cette fois, nous y travaillons régulièrement. D’une part nous voulons élaborer un plan de développement touristique de la partie française, et d’autre part, nous voulons aussi faire la même chose sur le plan purement économique. Nantis de ces deux outils, nous saurons où aller et comment.

SxmEco: Une conclusion ou un sujet dont vous aimeriez parler, avec en préalable un petit mot sur l’avenir à court et moyen terme?

D. Gibbs: Le terme c’est dans les deux ans qui viennent que tout va démarrer. Je suis bien conscient des attentes de la population d’autant que la crise est venue rajouter une inquiétude qui pousse tout le monde à exiger des résultats plus rapides. Mais d’un autre côté, j’ai toujours été bien conscient que la première législature serait certainement totalement occupée par cet énorme chantier que représente le transfert de compétences et la mise en place d’une organisation complètement nouvelle, à tous les étages. Si c’était perceptible dès le vote, personne n’avait mesuré, pas même l’Etat, l’ampleur de la tâche.

Ce que j’aimerais souligner, c’est que je suis extrêmement attaché, ainsi que de toute l’équipe, Président en tête, à ce que tout se fasse, non seulement dans la transparence, mais aussi en concertation. C’est ainsi que nous poussons pour que les professionnels se constituent en associations. Nous ne pouvons parler à des personnes, nous ne devons parler qu’à des représentants. Ainsi les restaurateurs se sont regroupés au travers de la FERCOM , ou le BTP est en train de se fédérer. Je suis donc extrêmement attaché dans les commissions que j’anime à ce partenariat étroit avec les socio-professionnels. Je crois que c’est une nouvelle manière de travailler à Saint Martin, et j’espère qu’elle portera ses fruits. Ce travail d’étude est d’ailleurs en partie financé par l’Etat puisque nous avions obtenu de Mr Jego une aide substantielle pour mener deux commissions dans le domaine économique. Nous recevons ainsi lors de nos réunions de travail avec les professionnels des gens extrêmement compétents que le Ministère nous envoie.  Nous menons en parallèle notre propre analyse tandis que l’Etat finance la société ODIT France qui réalise son audit. Les conclusions devraient en être connues vers la fin de l’année et c’est cela qui nous permettra de structurer notre marche en avant. Si je peux insister sur un point, c’est celui-là: nous travaillons, nous avançons, mais surtout, nous ne voulons pas faire d’erreurs. Et ce temps de la réflexion…..c’est justement du temps.

   
       

Propos recueillis par Yves Kinard.

   
       

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Les brèves:

   
               
   

La taxe routière.

   
   

Nous n’avons évidemment pas à nous prononcer sur l’opportunité ou la légalité de la taxe routière. Mais force est de constater que face à une administration fiscale, quelle qu’elle soit, le citoyen n’a d’autre recours que de payer dans un premier temps pour ensuite discuter. Si cela passe par engager un recours, c’est tout à fait normal (républicain et démocratique), mais cela ne dispense pas de payer quand même sa taxe. Bien sûr l’Etat (ou la Collectivité), à ce jeu, dispose des moyens légaux de faire respecter ses décisions. Néanmoins, une bonne communication ou information en temps et en heure encouragerait peut-être les récalcitrants. A terme, beaucoup d’énergie dépensée de part et d’autre pour pas grand-chose et une légitimité politique douteuse pour certains…

     

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La taxe de mouillage.

   
   

Récemment, une certaine effervescence a animé les plaisanciers tranquillement mouillés dans la baie de Marigot. En effet, la Collectivité a tout à coup décidé d’appliquer une décision quasiment historique (datant de la Commune) relative à une taxe de mouillage sur son domaine portuaire. Même si légalement elle n’est pas discutable, la forme l’est un peu plus puisque un peu « abrupte ». Métimer, l’association des professionnels de la mer, s’est saisie de l’affaire dans la mesure où plusieurs de ses membres pourraient à terme subir les conséquences de cette décision.

Une réunion convoquée avec les divers protagonistes n’a pas conduit à trouver une solution et dans les faits on observe une situation un peu curieuse d’agents du port venant « encourager » les plaisanciers à payer leur taxe au bureau compétent sans d’ailleurs être bien sûr qu’ils le font. Une affaire à suivre, mais certainement aussi  à construire, pour assurer à l’escale Saint Martin une certaine pérennité chez les voileux qui s’arrêtaient ici avant le grand saut vers l’Europe, les USA, ou Panama, contribuant largement à l’économie locale par leurs approvisionnements, matériels, réparations ou préparation, restaurants, etc..

 

 

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Les abris bus.

       
   

Initiative heureuse de la Collectivité: la création d’abris bus. Les emplacements sont certes parfois un peu discutables, malgré qu’on nous dise qu’ils ont été soigneusement étudiés, notamment avec les Conseils de Quartiers, (comme celui du rond point du marché!!!!!!) mais l’idée est louable. Quoique….Bien sûr, l’économie passe par une rationalisation. Trop de véhicules, des bus qui s’arrêtent n’importe où, qui ralentissent la circulation, nuisent certainement à l’économie de l’île. Mais d’un autre côté, la course en avant du toujours plus d’argent, plus de profit, plus de rentabilité ne va-t-elle pas contribuer un jour à détruire ce qui faisait le cachet de nos îles? A savoir, cet art de vivre empreint de douceur, de nonchalance, qu’après tout nombre de touristes, ou de métros, sont venus chercher ici? Attention à ne pas vouloir trop en faire et perdre notre âme….au nom du progrès…...

     

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La vie chère…..à Saint Martin aussi.

   
   

Depuis maintenant plusieurs semaines, nos voisins guadeloupéens mobilisent leur île autour d’un thème qui fait tâche d’huile peu à peu et que semble tout à coup découvrir la métropole: celui du coût de la vie induit par divers facteurs qui mériteront dans un prochain numéro une analyse complète. Mais pour avancer sur l’un des points, celui du coût des produits alimentaires, nous avons fait une petite enquête sur un produit souvent mis en avant lors d’interviews dans la rue: l’eau en bouteille. Prenons comme exemple un pack d’eau Cristalline vendu en métropole sous l’enseigne Champion à 1,02 €, soit 0,1133 €/l. Dans un container de 20 pieds on met environ 30 tonnes. Prenons comme exemple un distributeur local de petite dimension mais chez qui on peut acheter en direct. Il fait 4 conteneurs  par mois, 2 d’eau, et 2 autres de produits à plus forte valeur ajoutée comme des sodas. Considérons donc que un tiers de son activité sera payée par l’eau.

   
    Achat 60.000 litres  6.800      
    Transport France/transitaire 2.000      
    Conteneur 3.800      
    Transport sxm/transitaire 960      
    Salaires 2 pers. + charges/3 1.600      
    Salaire gérant + charges/3 1.660      
    Loyer hangar/3 330      
    Camion livraison/3 200      
    Charges diverses/3 300      
    Total: 17.650      
   

Soit un prix au litre final sxm de 0,2942 €/l. A quoi il faut rajouter la marge qui permettra de payer la taxe professionnelle, additionnelle, les impôts, et le bénéfice. Supposons donc un facteur de 1,5, soit un prix du pack à 3,9717 €. Ce qui est sensiblement le prix en grande surface.

   
   

Or, on peut supposer que la grande surface n’achète pas à 1,02 €/pack, et que le poids du personnel, des charges diverses ne pèse pas aussi lourd que sur une petite entreprise. Par ailleurs, nous avons parlé de l’eau qui bénéficie d’un tarif conteneur plus favorable, car le prix public normal d’un 20 pieds est de 2.400 € et celui d’un 40’ de 3.400. Il faut aussi signaler qu’il y a 5 ans, les 7 transitaires locaux ont baissé leur tarif de 180 à 130€/m³ en raison de l’apparition sur le marché d’un concurrent moins cher. Mais les prix à la distribution n’ont pas changé, la différence est donc allée dans la poche des commerçants.  A ce stade, les chiffres montrent essentiellement que si nous ne voulons pas la contagion guadeloupéenne, deux solutions: communiquer sur les coûts réels, ou baisser les marges si elles sont exagérées. La balle est dans le camp de la distribution. Communiquez!

   
       

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